La tendresse au bord des yeux

Publié le 3 Avril 2021

Devant ma mère, je sens que je suis d’une race noble : celle qui n’envie rien. Albert Camus, Carnets.

En ce 24 octobre 2020, un soleil généreux est venu réchauffer la place du Château de Lourmarin.

Marie-Jeanne Coutagne, philosophe, s’apprêtait à donner une communication « Camus : mesure et gloire, de l’absurde à l’amour». Le film de Georges-Marc Benamou « Les vies d’Albert Camus » lui fera suite.

A la demande des organisateurs, une minute de silence est observée à la mémoire de Samuel Paty par un public nombreux.Marie-Jeanne a eu une chance extraordinaire « ... au lycée à Paris, notre professeur Jeanne Delais de Fréminville, nous abreuvait de Camus, on avait à le lire. Nous avions l’impression qu’il était tout près, qu’il nous accompagnait. Je la salue avec énormément de tendresse ... »

La gloire pour Albert Camus, qui s’est senti statufié par le prix Nobel, n’est jamais la célébrité.«La gloire renvoie à un excès qui est celui de l’amour, l’amour un fil conducteur, une promenade qu’il faut travailler... Cet amour tremblant et doux, dont on ne peut douter, cet amour qui est la seule réponse possible à l’injustice... Cet excès s’accorde avec le sens de la mesure auquel Camus est très fortement attaché, l’équilibre entre ombre et soleil, la pensée de midi... A travers l’expérience de la pauvreté, sans rancœur, Camus perçoit une exigence de justice, se battre pour tous ceux qui comme sa grand-mère, sa mère, les pauvres, ceux qui subissent tout de plein fouet... La justice, que mes petits mangent à leur faim... L’amour dans sa fragilité, qui descend du ciel sur la terre, la reconnaissance pour sa mère silencieuse... Dans cette voie, l’amour en sa démesure donne sens à la mesure, il peut sauver...»

Camus a expérimenté l’unité avec le monde : « ... oui, ma mère m’aime, et je l’aime, et en même temps le monde est beau et Tipasa est habité par les dieux.»

La très belle amitié avec René Char sera également évoquée, « une correspondance entre les deux hommes au niveau de la parole poétique...».

Cette parole que nous passons à Georges-Marc Benamou.

 

« Tout ce qui peut être fait aujourd’hui est une victoire », ainsi s’exprimait ce dernier, en présentant son film. Ce fut l’occasion pour le réalisateur d’évoquer son histoire algérienne, sa famille camusienne, son amitié avec Catherine Camus et Alexandre Alajbegovic.

Il a ainsi expliqué comment il a travaillé, au plus près des rythmes d’une vie, des ruptures, apparentes ou non : « La misère, ce n’est pas de la légende pour Camus... La période de l’Occupation aussi, méconnue...»

Il nous fera part également de l’émotion de Vincent Lindon, pleurant au téléphone : « Pourquoi tu ne m’as pas confié la voix? »

La projection pouvait commencer.

L’émotion était décidément au rendez-vous de toutes ces journées à Lourmarin.

Et la tendresse.

Alberte ASTAUD

La tendresse au bord des yeux
La tendresse au bord des yeux

Rédigé par RMAC

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